Interview Mme Florence Kalmes

Entretien avec Mme Florence Kalmes, volontaire au sein de la commission parcours de la CPTS Bords d'Allier

Entretien avec Florence Kalmes
Animateur :
Sébastien Bages (Coordinateur)
22 novembre 2023
Le parcours de soins

 

Bonjour Florence, peux-tu te présenter ?
Bonjour. Florence Kalmes, infirmière libérale à Maringues, depuis 2015. Auparavant, j’ai travaillé 21 ans au CHU de Clermont-Ferrand et voilà mon parcours.

Pourquoi as-tu rejoint la CPTS Bords d’Allier ?
Tout a commencé avec l’apparition de la Covid, avec le Dr. Richard qui a monté la CPTS et la MSP de Joze, puisque j’en fais partie. À vrai dire, je ne savais pas vraiment ce qu’il en était. Je ne comprenais pas bien le but de tous ces indicateurs et ce qu’il fallait faire. Mais j’ai été fortement conseillé de m’intégrer à la CPTS. En fin de compte, j’ai trouvé ça génial. Cela permet de lier tous les libéraux, qui ne se connaissent pas du tout, puisque nous sommes indépendants.

C’est quoi pour toi la CPTS Bords d’Allier ?
La CPTS Bords d’Allier, c’est un regroupement de libéraux professionnels, que cela soit les médecins, les pharmaciens, les kinés, les infirmiers,… Enfin bon, tous les professionnels de santé qui permettent de collaborer ensemble pour le bien des patients, tout simplement.

Cela veut dire quoi justement pour toi, cette rencontre entre le bien des patients et l’associatif ?
Quand tu es en libéral, le souci, c'est que tu es seule. Mais vraiment. Moi, j'ai vécu l'hôpital, où tu travailles toujours en harmonie avec les aide-soignantes, les ASH, les médecins, toutes les structures. Et là, d'un seul coup, tu te retrouves avec ta voiture et tes patients qui t'appellent, et tes soins. Donc c'est la transition, c'est super violent, parce que tu te retrouves face à tous un tas de choses où tu ne peux pas du tout pas discuter. Bien sûr, après, tu as des collègues, puisque nous on est dans un groupe. Nous sommes dans un cabinet où l’on est trois. Mais à ce moment-là, tu travailles souvent tout seul, car tu ne veux pas déranger tes collègues et tu ne connais personne à part les médecins avec qui tu peux discuter. Encore, nous, on a cette chance à Joze : on a une MSP. On peut avoir des interpluripro, des choses comme ça. Seulement, tu te retrouves toute seule.
Le fait de créer cette CPTS, ce regroupement de professionnels, cela te permet déjà de côtoyer tes collègues infirmiers qui sont à côté. Voir comment eux, ils peuvent faire. Surtout pendant la Covid, comment ils ont pu en baver, comme nous. Et puis tu peux avoir des relations avec les médecins, de construire un vrai contact, davantage que si tu prends un médecin de Pont-du-Château que tu ne connais pas. Si tu as vraiment un gros couac, tu les appelles au téléphone et tu ne te sens pas toute seule. Plus que les médecins, cela nous permet d’être en contact avec les kinés, les pharmaciens et les autres métiers qui ne sont pas forcément sur notre lieu de travail. La CPTS nous permet de nous connaître et d’avoir des rapports privilégiés.
J'ai discuté avec d'autres médecins qui n'ont pas envie de rentrer dans une CPTS car ils ont peur. Je ne sais pas comment ils expliquent cela. Ils pensent que la CPTS va leur prendre leur indépendance. Il me semble alors qu'ils n'ont pas compris du tout ce qu’était une CPTS. Ils ont l'impression que la Sécu a créé çà pour les englober dans cette structure et qu'ils ne seront plus du tout indépendants. Moi, je trouve bien un regroupement comme celui-là. J'ai travaillé tellement à l'hôpital, c'est bien de travailler en groupe et on est plus fort quand on est en groupe, que se retrouver isolé dans une voiture avec des patients. Ça te permet d'avoir d'autres avis et d'autres expériences, de les partager avec d'autres, c'est ce qu'il faut, à mon avis.

Tes mots-clés pour la CPTS seraient : regroupement, rencontre et partage ?
Tout à fait.

Dans quelle commission as-tu choisi d’être et pourquoi ?
La commission Parcours. Et pourquoi ? J'ai trouvé que c'était celle qui me correspondait le mieux par rapport à mon expérience. Le fait de travailler dans la commission Parcours entre le libéral et l'hôpital… C’est que nous, nous avons beaucoup, beaucoup de difficultés puisque les patients, quand ils partent à l'hôpital, nous n’avons aucun recul. Aussi, quand ils reviennent chez eux, on se retrouve face à des situations qui sont très compliquées. Il faut penser qu’il n’y a aucun lien entre l'hôpital et les libéraux. À l’hôpital, on avait des fiches de liaison. Quand un patient partait dans un service, on notait ce qu'il se passait. En libéral, on se retrouve démuni avec un patient qui sort du jour au lendemain ou du soir au matin. On ne sait pas ce qu'il se passe du tout ou ce qu'il s'est passé par rapport au patient. Ce parcours est un pas supplémentaire, un plus, qui devrait être obligatoire.

Tu mets beaucoup en avant ce côté liberté du libéral et ce côté isolement.
Moi je le vis. Il y en a qui aime beaucoup être seuls. Chaque personne à sa manière de vivre. Mais l'isolement, je trouve que ce n’est pas un avantage. Pour moi, ce n’est pas un avantage du tout, parce que tu travailles, cela fait huit ans et, en fin de compte, c’est lourd d’être seule. C’est vrai que tu as cette indépendance. Mais finalement, tu n’as pas beaucoup d’indépendance, car tu as tes soins qu’il faut que tu fasses. Le fait de les faire, forcément, tu es indépendant, mais tu es obligé de les faire. Donc l’indépendance, c’est comme quand tu es dans un service, tu as des soins, il faut que tu les fasses, mais tu es en harmonie avec les autres. Oui, tu n’as pas à supporter tes collègues le matin. Pour tout confier, je trouvais que c’était un avantage. Moi ce n’est plus trop mon truc.

Et sur cette commission parcours justement, comment y prends-tu part ?
Nous avons un petit groupe, pas énorme, mais avec des gens motivés ! Il y a le Dr. Medhi Garaoui, les deux kinés Sarah Cauliez et Stéphanie Marchand, et l’infirmière Lydie Bernard (NDLR : d’autres membres ont rejoint le groupe depuis). Je trouve que ce petit groupe motivé a toujours voulu avancer pendant un moment. Cela était un peu compliqué, car tu n’étais pas là (NDLR : le coordinateur, Sébastien Bages). Je trouve qu’on essaie de bien travailler et d’apporter des solutions sur le terrain, avec des choses mises en place.

Au-delà de ces réunions, de ces rencontres, comment prends-tu part au parcours avec l’association ?
Le fait d’avoir créé tout un tas d’objectifs, de créer le parcours. On a mis en place pas mal de choses, comme par exemple, une carte de suivi des professionnels de santé pour les patients.
La carte que nous avons mise en place, dans la théorie, c’est génial. En pratique, c’est très compliqué pour que ce soit opérationnel. Cette carte, que l’on donne à nos patients, sert à noter et nommer leur médecin, leur infirmier, leur kiné, etc. Au début, on leur explique. Ils ne comprennent pas bien ce que c’est une CPTS (c’est déjà compliqué pour le professionnel). Alors ils pensent surtout que c’est une publicité pour eux. Il faut alors prendre du temps, expliquer aux patients et à la famille, puisque souvent le patient n’est pas à même de toujours comprendre. Il faut surtout cette carte quand ils sont hospitalisés. En effet, ce n’est pas le jour même de l’hospitalisation où l’on donne cette carte. Il ne faut pas qu’ils l’oublient de la donner. Enfin, le jour où il la donne, lors de leur hospitalisation dans les services, ces derniers ne doivent pas oublier de nous faire le retour. Donc, en théorie, c’est très très bien, mais en pratique - s’il n’y a pas le professionnel derrière qui suit et pousse derrière - cela ne fonctionne pas. De mon côté, je connais très bien la commission parcours. Cependant, même au sein de la CPTS, chaque personne ne connaît pas forcément tout à fond et ne va donc pas mettre toujours tout en place. Elle peut également souvent oublier qu’il y a le parcours, comme moi, je peux oublier les autres commissions.

Tu utilises quoi de la commission Parcours, mis à part la carte ; comment t’organises-tu ?
Comment je fais ? Quand je sais qu’un patient va être hospitalisé ou qu’il a été hospitalisé ou est rentré à l’hôpital pour une urgence, alors c’est très simple : je t’appelle et c’est toi qui fais le lien avec l’hôpital. Parce que nous, quand nous appelons, on fait le tour des services, et souvent, on n’a pas le temps. C’est déjà compliqué de faire notre tournée, si en plus on doit appeler les hôpitaux ou les cliniques, en sachant qu’il faut attendre des heures au téléphone, c’est compliqué. Donc c’est vrai que toi, tu fais le lien, et le fait de faire le lien me décharge beaucoup. Après, j’ai juste à suivre ce que tu me marques. Voilà comment cela se passe l’hospitalisation et éventuellement le retour.

Une infirmière à la retraite m’a dit : « nous, avant, finalement, on contactait les hôpitaux et ça allait très bien. On n’a pas vraiment besoin de la CPTS et des commissions ». Que pourrais-tu en dire ?
Le « avant » … Si on regarde les structures comment elles sont faites maintenant, moi ayant travaillé à l’hôpital, j’étais dans une petite structure. Elle appartenait au CHU et c’était la Polyclinique. On était dans un petit bâtiment. Le « avant » c’était le téléphone. Maintenant, il faut envoyer des mails, les structures sont énormes, il faut forcément laisser une trace. Maintenant c’est énorme au niveau administratif et normalement par téléphone, on ne nous dit rien, ce qui est logique, car n’importe qui peut appeler. Quand je travaillais à l’hôpital, c’était la consigne « on ne dit rien au téléphone », c’est interdit. C’est assez logique, n’importe qui peut téléphoner : le voisin, des personnes malveillantes,… Donc ils ne nous disent rien. On a signé des conventions avec l’hôpital, ils savent quelle est la personne, entre autres toi, qui va téléphoner. Tu ne vas pas prendre les informations pour les divulguer à tout le monde. Ces informations sont pour les professionnels et pour le bien du patient, pour que son suivi soit le mieux pour son retour à domicile. Le « avant », ce n’était pas possible, tu ne pouvais pas téléphoner à l’hôpital, sauf si tu connaissais le médecin qui va te donner des infos. Autrement, l’hôpital ne te donnait jamais d’infos sur le parcours du patient : c’est interdit. Le « avant », c’est terminé. Le « avant », c’était avant maintenant et ce n’est plus possible.

Est-ce que l’association ou la commission t’oblige à certaines pratiques ou certaines façons de faire ?
La CPTS ne t’oblige à rien. Tu fais comme tu veux, c’est l’avantage. Tu es indépendant. Si tu veux entrer dans la CPTS ou en sortir, tu fais comme tu veux.
Cela te permet d’essayer de faire tes soins en harmonie avec les autres praticiens. Puis, quand tu as un peu les mêmes objectifs, cela te permet d’aider à orienter ta démarche pour ne pas partir dans tous les sens. Chacun fait comme il peut dans son quotidien de travail. Alors que là, tu as une trace, et tu peux essayer de faire comme c’est indiqué dans le but de te faciliter le travail. Si c’est pour les patients qui n’ont pas de médecin alors tu sais comment il faut faire. Nous, pour le parcours, il y a pas mal de trace, et les commissions t’aident quand tu as un problème. Elles t’aident à avancer.

Pas d’obligation mais de la synchronisation ?
C’est ça ! Ça t’aide dans des dédales, à mieux gérer, à faciliter l’esprit et du coup tout va plus vite. Tu ne te dis pas « comment je vais faire pour ce genre de problème » car tu as déjà le suivi sur lequel chacun a travaillé dessus, en harmonie avec les professionnels. Cela aide.

Qu’est-ce que la commission parcours a changé pour toi dans ta pratique ?
J’ai bien déjà un peu répondu tout à l'heure. Tu ne te retrouves pas isolé quand tu as un patient qui va être hospitalisé et tu sais très bien que son retour à domicile va être compliqué à domicile.
Par expérience où cela m’est arrivé un jour férié où tu te retrouves avec une mamie, qui s’est fait une fracture du bassin. Donc tu téléphones à l’hôpital, ils viennent la chercher. Puis, quand elle revient le lendemain à domicile, avec le papi de 90 ans comme seule assistance, on doit se débrouiller. Nous n'avons pas de lit médicalisé, rien n’a été mis en place, pas de kiné, ni pour la toilette, avec une autonomie relative… Tu appelles ta collègue et tu dis « au secours ». Impossible de gérer seule une mamie. Elle était à l’hôpital et d’un seul coup, il faut gérer comme si elle y était toujours, mais chez elle. Nous, on ne peut pas tout gérer les soins de nursing, la mobilisation, etc. Le fait d’être dans une CPTS, avec une structure et des conventions signées entre nous et eux, ce genre de choses ne peut plus arriver. Normalement, cela ne devrait plus arriver. Toi (NDLR : la coordination), tu seras là, en lien, en disant : « Attendez, vous avez signé des conventions, vous ne pouvez pas renvoyer quelqu’un comme cela ». Je pense que c’est un peu notre cheval de bataille. Ce sont des choses qui ne peuvent plus arriver pour le patient, car nous, on va être submergés. On ne voit pas que nous, en tant que professionnels, on travaille pour le patient. Un patient qui reste 45 jours alité a forcément des escarres. C’est forcément un retour direct à l’hôpital. Ce sont des allers-retours que tout le monde veut éviter.
Ce que l’on souhaite, car rien n’est parfait, c’est que tout soit à peu près mis en place pour la personne qui rentre chez elle, en y restant le plus longtemps sans aller engorger les urgences. Il est plus pertinent qu’elle reste un peu plus à l'hôpital et que tout soit mis en place par un coordinateur pour que le retour à domicile se fasse au mieux.

Quels sont, selon toi, les axes à améliorer pour le parcours ?
Les axes à améliorer, il y en a beaucoup. Déjà à l’hôpital ou dans les cliniques où il y a tellement de monde qui a tellement de sollicitations sur tout, que nous, nous passons un peu aux oubliettes. Mais je pense que plus on va en parler et plus les gens de l’hôpital et des cliniques vont trouver un bénéfice. Si on peut se décharger de quelque chose, on téléphone à un coordinateur et lui, il va faire le lien, que cela soit les médecins ou les infirmiers. Ils vont commencer à se dire qu’il va falloir penser au retour à domicile. Voici donc un travail en harmonie. Ils vont savoir que cela va leur faciliter la tâche, à eux comme à nous. Plus on est nombreux, plus c’est facile de prendre en charge le patient. Si les structures sont bien mises en place : ça va rouler.
De notre côté, il faut mettre ça dans un coin de notre tête : dès qu’il y a hospitalisation, il y a Parcours de soins. Quand les personnes sont autonomes, il n’y a pas besoin du Parcours. On travaille avec suffisamment de patients âgés, ou il faut penser : dès qu’il y a hospitalisation, il y a Parcours.

Ce que tu dirais pour améliorer le parcours, c’est créer des automatismes chez les professionnels de la CPTS ?
Nous, on est à fond dans le parcours, c’est facile pour nous. Il faut que les professionnels pensent que c’est un bien-être pour eux et que cela ne peut que les aider. Quand toi (NDLR : la coordination), tu m’écris, que je sais que la personne est dans tel service, qu’elle a eu ça et qu’elle va être transférée dans tel autre service, puis qu’il va y avoir retour à domicile, cela facilite le travail. Je ne vois pas pourquoi le professionnel de santé ne peut pas en bénéficier. Il faut qu’il pense que cela existe. Tant qu’il n’a pas créé cet automatisme, il ne pourra pas le savoir.

Quelle serait la pratique pour mettre en place cet automatisme chez les différents professionnels ?
Dans notre CPTS, il faut en parler. Il faudrait qu’ils sachent que cela existe, qu’ils connaissent les avantages et leur montrer au moins une fois. Toutefois, il faut qu’ils y pensent. Cela appartient à la motivation individuelle de chaque personne. Tant que ce n’est pas le cas, tu ne peux pas faire grand-chose. Après, quand elle se retrouvera face à la situation où la personne revient à domicile en catastrophe, elle va peut-être y penser la prochaine fois. Comme nous sommes indépendants, tu ne peux pas aller dire : si tu avais fait ça, cela aurait été mieux, c’est là la limite.
Quand tu es dans une structure comme à l’hôpital, une personne pourrait te dire que tu devrais faire comme ça, ce serait plus facile. À ce moment-là, la personne tilterait tout de suite. Là, c’est difficile, comme tu travailles tout seul, les autres ne peuvent pas te le dire et t’inviter à faire autrement.

Sur les axes à améliorer, j’ai la même question pour l’association. Qu’aimerais-tu voir comme amélioration pour mieux répondre au territoire, aux patients et aux professionnels de santé. Quelles choses mettrais-tu en place, même si c’est utopique ?
Moi ce que j’aimerais, c’est qu’il y ait plus de professionnels de santé dedans. C’est vrai que, plus on est nombreux, plus c’est difficile. Avec le nombre, cela devient compliqué à gérer, car chacun à ses opinions... et heureusement. Il faudrait que l’on puisse regrouper tous les médecins du territoire et le plus de professionnels possibles. C’est grâce à nos expériences communes que l’on peut avancer, je le vois bien. J’ai discuté avec d’autres médecins et d’autres professionnels de santé, je n’arrive pas à leur faire comprendre qu’une CPTS, ce n’est qu’un bénéfice pour eux : ils ne voient pas le bénéfice.

Si tu avais une action nouvelle à mettre en place pour des patients que tu vois souvent, quelle serait-elle pour améliorer les choses ?
Par rapport à la CPTS, ce qui me vient tout de suite à l’idée est d’éviter l’isolement de certaines personnes, des patients âgés. Il y en a certains, ils ne voient que nous et je trouve qu’ils sont seuls, mais vraiment seuls. La seule chose qu’on leur propose pour les sortir, c’est de la kiné. De notre côté, on discute le temps que l’on peut, mais d’avoir quelqu’un qui puisse les sortir, que les patients puissent aussi sortir de chez eux et rencontrer d’autres personnes serait bien. Il y a les clubs, mais il faut pouvoir se déplacer. Je trouve que la solitude des gens est terrible. Ils nous disent « vous partez déjà », mais nous, on n’a pas le temps. Faire quelque chose contre la solitude des gens. Il y a ASALEE qui existe, mais ASALEE ne peut pas aller chez une personne et le faire que pour une seule personne. Ce sont les personnes les plus isolées qui ne sont pas prises en charge.

Le social, rompre la solitude. On sait qu’une personne âgée qui perd la motricité, c’est une personne qui décédera en peu de temps.
Oui, elle va décompenser, puis forcément, c’est le syndrome de glissement. Des fois, ce n’est pas grand-chose, j’ai un patient, il est aveugle. Cela fait 5 ou 6 ans qu’il me dit en a marre, qu’il va mourir, qu’il veut se pendre. C’est difficile de se pendre quand on ne trouve pas la corde ni le moyen de l’accrocher, cela le fait rire d’ailleurs. Ce n’est pas grand-chose, tu le prends dans tes bras, tu danses avec lui et après, il n’a plus ce comportement et il n’est plus triste. C’est une action. Nous, on passe trois fois par jour chez lui. Le fait de faire une petite action, cela lui donne une motivation sur l’instant. Ça ne veut pas dire qu’après il ne va pas ruminer la nuit. Je comprends que l’on ne peut pas donner des solutions à tout le monde. Le patient aimerait bien sortir, le problème quand tu es aveugle, tu fais quoi ?
Bref, permettre à la personne âgée de côtoyer d’autres personnes et de rompre la solitude. En maison de retraite avant la COVID, à Culhat, il faisait un truc génial une ou deux fois l’an, avec l’école maternelle qui est à côté. Les enfants venaient à l’EHPAD. Mon fils, avec son école, allaient à l’EHPAD d’Ennezat. Effectivement les enfants voyaient ces gens sur des fauteuils et mon fils disaient : « c’est bizarre la dame elle fait comme ça », aux enfants cela leur a apporté énormément et les personnes âgées, elles voyaient cette jeunesse qu’elles n’ont plus. Car forcément, quand tu te retrouves en EHPAD, tes petits-enfants et arrière-petits-enfants, tu ne les voies plus. Il manque cette jeunesse aux personnes âgées, ils en ont besoin. Je ne comprends pas que cela ne soit pas plus mis en place. Effectivement, il y a eu la COVID et tout a été arrêté. Est-ce qu’il ne vaut pas mieux mourir par une infection portée par un enfant que de mourir dans la solitude complète ? Je trouve que cela devrait être obligatoire, que les écoles maternelles aillent dans les EHPADs. Les personnes âgées sont revigorées quand elles voient tous ces enfants qui les font rire. Ils sont attentifs, échangent des marques d’affection. Ils sont mignons envers eux, parce que les gamins sont plus attendrissants avec les personnes âgées qu’entre eux, le tout dans un bénéfice réciproque.

Je te remercie Florence, j’espère que l’ambition que tu portes contaminera la plupart des personnes sur le territoire et plus loin encore.